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SERMON pour le 9ème dimanche après la Trinité

1 Corinthiens 10/1-13 ; Luc 15/11-32

 

LE FILS PRODIGUE ET LA TENTATION

 

La parabole du Fils prodigue présente trois personnages principaux : Le Père, le fils aîné, et le petit dernier. Le parallèle entre le Père de la parabole et notre Père céleste est évidente : tout Lui appartient, Il fait ce qu'Il veut de Ses biens, et surtout Il est bon - divinement bon. Il pardonne à foison, et semble faire plus de cas de son petit dernier que du fils aîné.

 

Déshériter l'aîné au profit du second est une attitude qui n'est pas nouvelle de la part du Dieu de la Bible (Genèse 27/30-40) : « Isaac avait fini de bénir Jacob et celui-ci avait à peine quitté son père Isaac lorsque son frère Esaü revint de la chasse. Il prépara, lui aussi, un plat qu’il apporta à son père. Il dit à son père : "Que mon père se lève et mange du gibier de son fils, afin que tu me bénisses !" Son père Isaac lui demanda : "Qui es-tu ?" Il répondit : "Je suis ton fils aîné Esaü." Isaac fut saisi d’une grande, d’une violente émotion et dit : "Qui est donc celui qui a chassé du gibier et me l’a apporté ? J’ai mangé de tout avant que tu ne viennes et je l’ai béni. Et effectivement, il sera béni." Lorsque Esaü entendit les paroles de son père, il poussa de grands cris pleins d’amertume et il dit à son père : "Bénis-moi aussi, mon père !" Isaac dit : "Ton frère est venu avec ruse et a pris ta bénédiction." Esaü dit : "Est-ce parce qu’on l’a appelé Jacob qu’il m’a supplanté deux fois ? Il a pris mon droit d’aînesse, et voici maintenant qu’il a pris ma bénédiction." Il ajouta : "N’as-tu pas de bénédiction en réserve pour moi ?" Isaac répondit à Esaü : "Je l’ai désigné comme ton maître et je lui ai donné tous ses frères pour serviteurs, je l’ai pourvu en blé et en vin. Que puis-je donc faire pour toi, mon fils ?" Esaü dit à son père : "N’as-tu que cette seule bénédiction, mon père ? Bénis-moi aussi, mon père !" et il se mit à pleurer tout haut. Son père Isaac lui répondit : "Ton lieu d’habitation sera privé des richesses de la terre et de la rosée du ciel, d’en haut. Tu vivras de ton épée et tu seras asservi à ton frère. Cependant, en errant librement çà et là, tu échapperas à la domination qu’il t’aura imposée." ». Tout cela, après qu'Esaü ait vendu son droit d'aînesse à son petit frère pour un plat de lentilles (Genèse 25/31-34) : « Jacob répondit : "Vends-moi aujourd’hui ton droit d’aînesse." Esaü répondit : "Je vais mourir. A quoi me sert ce droit d’aînesse ?" Jacob dit : "Jure-le-moi d’abord." Il le lui jura, il vendit son droit d’aînesse à Jacob. Alors Jacob donna du pain et du potage de lentilles à Esaü. Il mangea et but, puis se leva et s’en alla. C’est ainsi qu’Esaü méprisa le droit d’aînesse ». C'est volontairement qu'Esaü a cédé son droit d'aînesse à son petit frère Jacob-Israël. Il n'y a donc aucune injustice de la part de leur père Isaac, ni de la part de notre Père céleste.

 

David aussi était le petit dernier d'une famille nombreuse, puisque composée de 8 fils d'Isaï, non compris les filles (1 Samuel 16/10-13) : « Isaï fit passer sept de ses fils devant Samuel et Samuel dit à Isaï : "L’Eternel n’a choisi aucun d’eux." Puis Samuel dit à Isaï : "Tous tes fils sont-ils là ?" Il répondit : "Il reste encore le plus jeune, mais il garde les brebis." Alors Samuel dit à Isaï : "Envoie quelqu’un le chercher, car nous ne prendrons pas place avant qu’il ne soit arrivé." Isaï envoya quelqu’un le chercher. Il était roux, avec de beaux yeux et une belle apparence. L’Eternel dit à Samuel : "Lève-toi, verse de l’huile sur lui, car c’est lui !" Samuel prit la corne d’huile et le consacra par onction au milieu de ses frères. L’Esprit de l’Eternel vint sur David, à partir de ce jour et par la suite ». Cette fois, le choix du petit dernier vient directement de Dieu, et ce choix est accompagné de bénédictions insignes qui distinguent David entre tous.

 

Ne négligeons pas les bénédictions que l'Eternel nous accorde avec notre élection, car nous sommes le peuple dernier-né du Père, tandis que le peuple Juif est l'aîné. Et le peuple élu s'étant détourné de Dieu pour adorer des idoles monstrueuses - de véritables abominations selon la Parole de Dieu - Dieu l'a déchu de son droit d'aînesse et Il a béni le plus jeune : le peuple Chrétien, Son Église, qu'Il chérit comme Son épouse.

 

Mais le fait d'être le petit dernier, le préféré et béni de Dieu ne fait pas de nous des surhommes à la manière de Nietzsche. Nous ne sommes pas exempts de tentations diverses. Et nous y succombons parfois, pour ne pas dire souvent. Ainsi, le fils prodigue a-t-il demandé sa part d'héritage dans le but de quitter son père et ne plus avoir à lui obéir. Il voulait n'en faire qu'à sa tête. Mal lui en a pris, puisqu'il a cédé à la tentation de la facilité et de la paresse, du luxe et de l'oisiveté. Il s'est retrouvé seul, pauvre, abandonné de tous et même de Dieu qui l'avait pris au mot, pour le mettre à l'épreuve, puis le soumettre par le moyen de la repentance. Finalement, le petit dernier, le fêtard, déchante et revient à son père, contrit et enfin soumis (Luc 15/19) : « Je vais retourner vers mon père et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes ouvriers ».

 

Et c'est alors au tour du père de faire la fête pour son fils parti ou loin et revenu (Luc 15/23-24) : « Amenez le veau qu’on a engraissé et tuez-le ! Mangeons et réjouissons-nous, car mon fils que voici était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé.’ Et ils commencèrent à faire la fête ».

 

Faut-il préciser que le sacrifice du veau gras préfigure celui de Christ à la croix ? Faut-il répéter encore que c'est par ce sacrifice que nous sommes sauvés, si nous croyons et que nous nous repentons de chaque péché en demandant pardon à Dieu ? Nous sommes tous des fils et des filles prodigues, et il nous faut constamment revenir à notre Père céleste dans la repentance et la contrition. Peu importe le qu'en dira-t-on ! Comme le Fils prodigue, nous étions spirituellement morts, et nous sommes nés de nouveau par la foi que le Saint-Esprit a mise dans notre cœur. Le jugement des autres ne nous touche pas ; que pèse-t-il en regard du Jugement dernier et de la façon dont notre Père céleste nous voit ? Le monde peut se mettre en colère contre nous, il ne peut pas nous arracher de la main du Père (Luc 15/28a) : « Le fils aîné se mit en colère et il ne voulait pas entrer ». De fait, tel Esaü, le fils aîné renonce à son droit d'aînesse, au profit du fils prodigue nouvellement repenti et définitivement converti (Luc 15/7) : « De même, je vous le dis, il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour 99 justes qui n’ont pas besoin de changer d’attitude ».

 

Imaginez seulement quelle sera la joie du Père éternel lorsqu'à la fin les Juifs seront convertis à Christ… Pour l'heure, ils sont majoritairement incrédules et rejettent Christ et son œuvre de rédemption (Romains 10/19-21) : « Je demande encore : "Israël n’aurait-il pas compris ?" Moïse, le premier, dit : "Je provoquerai votre jalousie par ceux qui ne sont pas une nation, je provoquerai votre irritation par une nation sans intelligence". Quant à Esaïe, il pousse la hardiesse jusqu’à déclarer : "Je me suis laissé trouver par ceux qui ne me cherchaient pas, je me suis révélé à ceux qui ne me demandaient rien." Mais au sujet d’Israël il dit : "A longueur de journée, j’ai tendu mes mains vers un peuple désobéissant et rebelle." ». Mais Dieu les convertira en dernier lieu, comme Il a ramené le fils prodigue à son père (Romains 11/23-27) : « Quant aux Israélites, s’ils ne persistent pas dans l’incrédulité, ils seront greffés, car Dieu est puissant pour les greffer de nouveau. Si toi, tu as été coupé de l’olivier sauvage auquel tu appartenais par nature et greffé contrairement à ta nature sur l’olivier cultivé, à plus forte raison eux seront-ils greffés conformément à leur nature sur leur propre olivier. En effet, je ne veux pas, frères et sœurs, que vous ignoriez ce mystère, afin que vous ne vous preniez pas pour des sages : une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement jusqu’à ce que l’ensemble des non-Juifs soit entré. Et ainsi tout Israël sera sauvé, comme le dit l’Écriture : Le libérateur viendra de Sion et il écartera de Jacob les impiétés. Et telle sera mon alliance avec eux, lorsque j’enlèverai leurs péchés ».

 

Imaginez la scène ! Le petit dernier - le fils prodigue - chargé d'accueillir son frère aîné dans le paradis céleste ! Pour le moment, les Juifs refusent d'y entrer, mais ils finiront bien par y venir, car l'Alliance de Dieu avec Abraham est une alliance perpétuelle (Genèse 17/7) : « J’établirai mon alliance entre moi et toi, ainsi que tes descendants après toi, au fil des générations : ce sera une alliance perpétuelle en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de ta descendance après toi ». Notre Seigneur Jésus-Christ ne dit pas autre chose dans Sa parabole : (Luc 15/31) : « Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi et tout ce que j’ai est à toi ». Si le père se réjouit et organise la fête pour le fils prodigue parce qu'il est revenu à son père, il ne rejette pas entièrement son fils aîné, car le peuple élu en Abraham finira par venir à Christ, à la toute fin de l'histoire de ce monde. Sa présence sur terre, même rebelle, nous procure au moins cet avantage : nul ne peut prétendre que l'Ancien testament serait un faux écrit par les Chrétiens pour justifier et confirmer l'Évangile de Christ, tant que des Israélites sont là pour attester de l'origine antique et l'authenticité des prophéties annonçant Christ et son œuvre de rachat des perdus.

 

Écrivant aux Corinthiens, Paul rétablit le lien entre Christ et son peuple élu (1 Corinthiens 10/1-4) : « Frères et sœurs, je ne veux pas vous laisser ignorer que nos ancêtres ont tous été sous la nuée et qu’ils ont tous passé à travers la mer ; ils ont tous été baptisés en Moïse dans la nuée et dans la mer, ils ont tous mangé la même nourriture spirituelle et ils ont tous bu la même boisson spirituelle. En effet, ils buvaient à un rocher spirituel qui les accompagnait, et ce rocher était Christ ». Mais, comme le fils prodigue, ils s'en sont éloignés pour vivre dans la débauche spirituelle (le veau d'or) et matérielle (1 Corinthiens 10/7) : « Ne devenez pas idolâtres comme certains d’entre eux. En effet, il est écrit : Le peuple s’assit pour manger et pour boire ; puis ils se levèrent pour s’amuser ». Ils ont cédé à la tentation du diable (verset 6) : « Or ces faits sont arrivés pour nous servir d’exemples, afin que nous n’ayons pas de mauvais désirs comme eux en ont eu ». Comme le fils prodigue et comme chacun d'entre nous, ils ont été tentés, et la plupart sont tombés et sont morts (versets 8-10) : « Ne nous livrons pas non plus à l’immoralité sexuelle comme certains d’entre eux l’ont fait, de sorte que 23’000 sont tombés en un seul jour. Ne provoquons pas Christ comme certains d’entre eux l’ont fait, si bien qu’ils sont morts, victimes des serpents. Ne murmurez pas comme certains d’entre eux l’ont fait, de sorte qu’ils sont morts sous les coups du destructeur ». Paul définit le péché comme une provocation contre Christ, même chez les Juifs qui ne croient pas en Lui. En effet, nul ne peut échapper à Dieu. Il a tout créé, voit tout, sait tout, dirige tout, et à la fin, nous verrons Sa gloire.

 

Au reste, (1 Corinthiens 10/13) : « Aucune tentation ne vous est survenue qui n’ait été humaine. Dieu est fidèle, et il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces ; mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d’en sortir, afin que vous puissiez la supporter ». Nous n'avons aucune excuse ! Si nous prions Jésus-Christ avec ferveur, le diable s'écartera de notre chemin et la tentation s'en ira avec lui. Jésus fut tenté au désert par le Tentateur en personne, mais Il puisa dans la Parole de Dieu la force de résister, et Satan renonça à Le dominer (Matthieu 4/10-11) : « Jésus lui dit alors : "Retire-toi, Satan ! En effet, il est écrit : C’est le Seigneur, ton Dieu, que tu adoreras et c’est lui seul que tu serviras." Alors le diable le laissa. Et voici que des anges s’approchèrent de Jésus et le servirent ». Nous avons reçu non seulement le pouvoir de supporter la tentation, mais également celui d'y mettre fin, par la prière (Matthieu 6/13) : « … ne nous expose pas à la tentation, mais délivre-nous du mal, car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen ! ». Délivre nous-du mal ou du Malin - Satan - c'est équivalent, car c'est le même mot grec qui signifie les deux choses.

 

Nous devons comprendre trois choses :

  1. Dieu ne tente personne. Il nous livre à Satan si, comme le fils prodigue, nous nous écartons de Sa voie et de Sa sainte volonté : Dieu nous prend alors au mot.

  2. Résister à la tentation n'est pas dans nos capacités humaines. Si nous ne faisons pas appel à Jésus-Christ, nous chuterons, c'est inévitable ; ayons donc l'humilité de nous en remettre à notre Seigneur Christ, dans la prière.

  3. Résister à la tentation, c'est résister à une personne : Satan, ou l'un de ses mauvais anges. La vie spirituelle est un combat contre ces créatures rebelles à Dieu, qui ne peut être gagné que par Christ Lui-même. Raison de plus pour l'appeler à notre secours, dans la tentation.

 

Ainsi armés, et connaissant la stratégie divine d'une part, et les stratagèmes de Satan d'autre part, nous n'aurons pas peur. Nous reconnaîtrons plutôt notre faiblesse et notre besoin impérieux du Saint-Esprit en nous avec Sa puissance divine pour repousser le Tentateur, en priant notre Père céleste de nous délivrer de la tentation, du mal et du Malin, au nom de Jésus-Christ et à la gloire du Père. Amen.

 

Tr. Révd Yves Méra, évêque AOC France.

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