11-De la prostitution
11-De la prostitution
I-11. De la prostitution et de l'impureté
{26} 1. Bien que des essaims entiers de vices, très chers frères, ne soient pas nécessaires pour mériter d'être réprimandé, la piété et la vertu sont tombées en décadence, et par-dessus tous les vices nous devons mentionner le scandale de l'adultère, de la prostitution, de la fornication et de l'impureté qui, non seulement se sont introduits dans le monde, mais s'y sont répandus presque partout, entraînant un grand déshonneur pour Dieu, une infamie excessive pour le Nom de Christ, la corruption de la vraie religion et la destruction totale du bien public ; et ceci, avec une abondance telle que par un usage devenu habituel de ces choses, ce vice s'est accru si grandement que pour beaucoup de gens il n'est plus compté comme un péché, mais plutôt un passe-temps, un badinage de jeunesse qui n'est plus réprimandé mais approuvé d'un clin d'œil [complice], et qui n'est plus un motif de punition mais de rigolade. C'est pourquoi il est à présent nécessaire de traiter du péché de la prostitution et de la fornication, en vous déclarant la gravité de ce péché odieux, détestable et abominable, qui a toujours été regardé comme tel par Dieu et par tous les hommes de bien, et gravement puni tant par la Loi de Dieu que par les lois des divers princes ; et en vous montrant quelques remèdes grâce auxquels, par la grâce de Dieu, nous pouvons échapper à ce très détestable péché de prostitution et de fornication, et mener nos vies en toute honnêteté et pureté.
Et afin de percevoir que la fornication et la prostitution sont aux yeux de Dieu de très abominables péchés, rappelez-vous ce Commandement de Dieu, « Tu ne commettras pas d'adultère ». Et par ce mot « adultère », bien qu'il signifie proprement l'union intime d'un homme marié avec toute autre femme que la sienne, ou d'une femme avec tout autre homme que son mari, il désigne aussi tout usage impropre de ces parties qui sont destinées à la génération. Et ce seul Commande-ment interdisant l'adultère décrit suffisamment à nos yeux la gravité de ce péché de prostitution, et il déclare manifestement combien il devrait être abhorré de toute personne fidèle et honnête. Et aucun de nous ne peut s'estimer exempté de ce Commandement, qu'on soit vieux ou jeune, marié ou célibataire, homme ou femme, écoutez ce que Dieu le Père a dit par son très excellent prophète Moïse ; « Il n'y aura pas de prostituées parmi les filles d'Israël, ni de prostitués parmi les fils d'Israël ». Ainsi, la prostitution, la fornication et toute impureté sont interdites à tous, de toutes classes et de tous âges, sans exception.
Et afin que nous ne doutions pas que ce précepte nous est destiné, écoutez ce que Christ le parfait enseignant de toute vérité, dit dans le Nouveau Testament : « Vous avez entendu », dit Christ, « qu'il a été dit aux anciens : Tu ne commettras pas d'adultère ; mais Je vous dis : Quiconque regarde une femme comme un sujet de luxure a déjà commis l'adultère avec elle, dans son cœur ».
Ici, Christ notre Sauveur n'établit et ne confirme pas seulement la Loi contre l'adultère, donnée dans l'Ancien Testament de Dieu le Père par Son serviteur Moïse, en lui donnant toute autorité, mais aussi, en condamnant l'interprétation grossière des scribes et des Pharisiens qui enseignaient que ce Commandement exigeait seulement de s'abstenir de l'adultère public et pas des désirs cochons et de la luxure impure, Il nous a enseigné l'exacte et totale perfection de la netteté et de la pureté de vie, pour garder notre corps sans tache et notre cœur pur et libre de toute mauvaise pensée, désir charnel et attirance physique. Comment pouvons-nous donc être libérés de ce Commandement, qui nous impose une charge si lourde ? Un serviteur peut-il faire ce qu'il veut dans tous les domaines, ayant reçu de son maître un ordre contraire ? Christ n'est-Il pas notre Maître ? Ne sommes-nous pas Ses serviteurs ? Comment dès lors pouvons-nous négliger la volonté et le plaisir de notre Maître pour suivre notre propre volonté, à notre gré ? « Vous êtes Mes amis », dit Christ, « si vous gardez ces choses que Je vous commande ». Et Christ notre Maître nous a commandé de rejeter toute impureté et toute idée de luxure, dans notre corps et dans notre esprit ; voilà ce que nous devons faire si nous voulons plaire à Dieu.
Dans l'Évangile de St Matthieu, nous lisons que les scribes et les Pharisiens ont été grave-ment offensés par Christ parce que Ses disciples n'observaient pas les traditions des ancêtres, car ils ne se lavaient pas les mains avant les repas ; et parmi d'autres choses, Christ leur a répondu, en disant : « Écoutez et comprenez. Ce n'est pas ce qui entre dans la bouche qui corrompt l'homme, mais ce qui sort de la bouche qui corrompt l'homme. Car ces choses qui sortent de la bouche viennent du cœur, et elles corrompent l'homme. Car c'est du cœur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, la prostitution, les vols, les faux témoignages, les blasphèmes. Voilà ce qui corrompt l'homme ». Nous voyons ici que pas seulement le meurtre, le vol, le faux témoignage et le blasphème corrompent les hommes, mais aussi les mauvaises pensées, l'adultère, la fornication et la prostitution. Qui a si peu d'esprit qu'il estime la prostitution et la fornication comme des choses de peu d'importance et de nul poids devant Dieu ? Christ, qui est la vérité, ne peut pas mentir ; Il a dit que les mauvaises pensées, l'adultère, la prostitution et la fornication corrompent l'homme, à savoir son corps et son âme, et en font, au lieu du temple du Saint-Esprit, un sale fumier, ou le repaire de tous les esprits impurs ; au lieu d'une maison de Dieu : la demeure de Satan.
Et dans l'Évangile de St Jean, quand la femme surprise en adultère fut amenée à Christ, ne lui a-t-il pas dit ; « Va ton chemin et ne pèche plus » ? N'a-t-il pas appelé par là la prostitution un péché ? Et quelle est la sanction du péché, sinon la mort éternelle ? Si la prostitution est un péché, alors il est illicite de la commettre. Car St Jean a dit : « Celui qui commet le péché est du diable ». Et notre Sauveur a dit : « Tous ceux qui commettent le péché sont les serviteurs du péché ». Si la prostitution n'avait pas été un péché, St Jean Baptiste n'aurait sûrement pas réprimandé le Roi Hé-rode pour avoir pris la femme de son frère, mais il lui a dit clairement qu'il n'avait pas le droit de prendre la femme de son frère. Il n'a pas fait un clin d'œil à Hérode pour cette prostitution, bien qu'il fût un roi très puissant, mais il l'a vertement réprimandé pour sa manière de vivre méchante et abominable, et pour cette raison il fut décapité. Mais il préférait subir la mort que de voir Dieu ainsi déshonoré par une infraction à Son saint Commandement, que de laisser la prostitution sans sanction, même s'agissant d'un roi. Si la prostitution n'avait été qu'un passe-temps, une bagatelle, et une chose sans importance, comme beaucoup la voient aujourd'hui, Jean aurait été vraiment complètement fou de déplaire à un roi, ayant été jeté en prison et décapité pour une bagatelle. Mais Jean savait fort bien à quel point l'abominable péché de prostitution est sale et répugnant au regard de Dieu ; c'est pour cette raison qu'il ne voulait pas le laisser sans réprimande, non, même chez un roi. Si la prostitution n'est pas permise à un roi, elle n'est pas permise à un sujet. Si la prostitution n'est pas permise à un officier public, elle n'est pas permise non plus à un particulier, à vraiment aucun homme ou femme de quelque classe ou âge qu'ils soient.
De plus, dans les Actes des Apôtres nous lisons que quand les Apôtres et les Anciens, avec toute la congrégation, se sont réunis pour pacifier les cœurs des fidèles demeurant à Antioche, qui étaient troublés par la fausse doctrine de certains prédicateurs Juifs, ils ont envoyé un mot aux frères disant qu'il leur semblait bon ainsi qu'au Saint-Esprit de ne pas leur imposer plus qu'il n'était nécessaire ; parmi ces choses, ils voulaient qu'ils s'abstiennent de l'adultère et de la fornication, dont ils disaient, « Si vous vous [en] gardez, vous ferez bien ». Notez ici que ces Pères bénis et saints de l'Église de Christ ne voulaient pas imposer à la congrégation plus qu'il n'était nécessaire. Marc non plus, et parmi ces choses dont ils commandaient aux frères d'Antioche de s'abstenir, la fornication et la prostitution étaient nommées. Il est donc nécessaire, d'après la détermination et le consentement du Saint-Esprit, des Apôtres et des Anciens, et de toute la congrégation, de nous abstenir de la fornication et de la prostitution, au même titre que de l'idolâtrie et de la superstition. Est-il nécessaire au Salut de s'abstenir de l'idolâtrie ? Oui. Il en est de même pour la prostitution, dont il faut s'abstenir pareillement. Y a-t-il une voie plus directe qui mène à la damnation que d'être idolâtre ? Non. De la même manière, il n'y a pas de chemin qui mène plus rapidement à la damnation que d'être un fornicateur ou une prostituée. Maintenant, où sont ces gens qui estiment si légèrement l'infidélité conjugale, la prostitution, la fornication et l'adultère ? Il est nécessaire, disent le Saint-Esprit, les Apôtres bénis, les Anciens, avec toute la congrégation de Christ ; il est nécessaire au Salut, disent-ils, de s'abstenir de la prostitution. Alors maudits soient ceux qui, négligeant leur Salut, permettent à leur pensée d'envisager un péché si sale et si répugnant, à un vice aussi méchant, à une si détestable abomination.
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{27} 2. Vous avez appris dans la première partie de ce sermon contre l'adultère, combien ce vice règne aujourd'hui au-dessus de tous les autres vices, et ce que signifie ce mot « adultère », et com-ment la Sainte Écriture dissuade de commettre ce dégoûtant péché, et finalement que la corruption détruit l'âme humaine par le péché d'adultère.
Avançons maintenant et écoutons ce que l'Apôtre béni St Paul a dit à ce sujet. En écrivant aux Romains, il a ces paroles : « Rejetons les œuvres des ténèbres et endossons l'armure de lumière. Marchons honnêtement comme s'il faisait plein jour, non en mangeant et en buvant, ni en coucheries ou en libertinage, ni en conflit ou dans la jalousie; mais endossez le Seigneur Jésus-Christ et ne prenez aucune disposition pour la chair, pour en satisfaire la luxure ». Ici, le saint Apôtre nous exhorte à rejeter les œuvres des ténèbres, que, parmi d'autres, il appelle la gloutonnerie, la beuverie, les coucheries et le libertinage, qui sont tous au service de ce vice et induisent au dégoûtant péché de la chair. Il les appelle les œuvres des ténèbres parce qu'elles sont habituellement faites dans le noir ou la nuit («car quiconque fait le mal déteste la lumière et ne vient pas à la lumière, afin que ses œuvres ne soient réprouvées ») mais elles mènent tout droit à ces « ténèbres extrêmes où seront les pleurs et les grincements de dents ». Et il dit dans un autre passage de la même épître : « Ceux qui sont dans la chair ne peuvent pas plaire à Dieu. Nous sommes débiteurs, non pas de la chair afin de vivre selon la chair, car si vous vivez selon la chair vous mourrez ».
Il dit encore : « Fuyez la fornication. Car tout péché qu'un homme commet, [il le commet] sans son corps, mais quiconque commet l'adultère pèche contre son propre corps. Ne savez-vous pas que vos membres sont le temple de l'Esprit-Saint qui est en vous, vous qui avez Dieu aussi, et que vous ne vous appartenez pas ? Car vous avez été chèrement [r]achetés. Glorifiez Dieu dans votre corps, etc. ». Et un peu plus loin, il dit : « Ne savez-vous pas que vos corps sont les membres de Christ ? Prendrai-je donc les membres de Christ pour en faire les membres d'une prostituée ? Dieu l'interdit. Ne savez-vous pas que celui qui couche avec une prostituée fait un seul corps avec elle ? Ils sont deux avec une seule chair, dit-il. Mais celui qui s'unit au Seigneur est un seul esprit [avec Lui] ». Quelles pieuses raisons l'Apôtre St Paul donne-t-il ici pour nous dissuader de la prostitution et de toute impureté ! « Vos membres », dit-il, «sont le temple du Saint-Esprit ; et quiconque Le souille, Dieu le détruira », comme dit St Paul. Si nous sommes le temple du Saint-Esprit, il est donc très déplacé de Le faire sortir de nous par la prostitution, et de mettre à Sa place les méchants esprits de l'impureté et de la fornication, et d'être unis à eux et de les servir ! « Vous avez été chèrement [r]achetés », dit-il, « pour cette raison, glorifiez Dieu dans votre corps ».
Christ, cet Agneau de Dieu innocent, nous a rachetés de la servitude du diable, « pas avec de l'or ou de l'argent corruptibles, mais avec Son très précieux sang » [sorti] de Son cœur. Dans quel but ? Pour que nous retombions dans notre ancienne manière de vivre, impure et abominable ? Non, vraiment ; mais pour que nous « Le servions tous les jours de notre vie en sainteté, droitement », pour que nous « Le glorifions dans notre corps »par une vie pure et saine. Il a déclaré également que « nos corps sont les membres de Christ ». C'est une chose invraisemblable que de cesser d'être incorporés et unis à Christ, et de nous unir par la fornication à une prostituée. Quel pire déshonneur ou injure pouvons-nous faire à Christ que de Lui enlever les membres de Son corps et de les unir à des prostituées, à des démons et à des esprits méchants ? Et quel pire déshonneur pouvons-nous nous infliger que de perdre par l'impureté une si excellente dignité et liberté, et de devenir des esclaves enchaînés et de misérables captifs des esprits des ténèbres ? Mettons donc la gloire de Christ à la première place, et notre état de dignité et de liberté, où Dieu nous a établis en nous donnant Son Saint-Esprit, et défendons-le contre Satan et tous ses assauts et machinations, afin que Christ soit honoré et que nous ne perdions pas notre liberté, mais que nous restions toujours un seul esprit avec Lui.
De plus, dans son épître aux Éphésiens, l'Apôtre béni nous veut purs et libérés de l'adultère. « Que la fornication et toute impureté ne soient pas même une fois mentionnées parmi nous, comme il convient à des saints ; ni l'impureté, ni les folles conversations, ni les plaisanteries qui ne sont pas belles, mais plutôt les actions de grâces. Car vous savez », dit-il, « que ni les prostituées, ni les impurs ou les cupides, qui sont des idolâtres, n'ont d'héritage dans le royaume de Christ-Dieu ». Et afin que nous nous rappelions d'être saints, purs et libérés de toute impureté, le saint Apôtre nous appelle saints, parce que nous sommes sanctifiés et rendus saints dans le sang de Christ, par le Saint-Esprit. Maintenant, si nous sommes saints, qu'avons-nous à faire avec les manières des païens ? St Pierre a dit : « Comme Celui qui vous a appelés est Saint, vous aussi soyez saints dans toute vos conversations, parce qu'il est écrit: Soyez saints, car Je suis Saint ».
Jusqu'ici nous avons entendu combien la fornication et la prostitution sont de graves péchés et combien Dieu les abhorre, à travers toute l'Écriture. Comment peuvent-ils être autre chose que de très abominables péchés, voyant qu'ils ne peuvent pas même une fois être nommés parmi les Chrétiens, et encore moins êtres commis ? Et sûrement, si nous soupesons le poids de ces péchés et les considérons pour ce qu'ils sont, nous trouvons que le péché de prostitution est cette mare très sale, cette ornière dégoûtante et cet évier puant dans lequel toutes sortes de péchés et de malignités s'écoulent, où ils s'installent et où ils demeurent. Car l'adultère n'est-il pas fier de sa prostitution ? Comme le sage l'a dit : « Ils sont contents quand ils ont fait le mal et se réjouissent avec des choses qui ne sont rien de bien net ». L'adultère n'est-il pas paresseux aussi, ne faisant pas ses délices des exercices de piété ? Son esprit n'est-il pas distrait et totalement détourné de toute étude vertueuse et de tout travail productif, étant adonné seulement à son imagination charnelle ? Les prostituées ne le poussent-elles pas à la gloutonnerie afin de le rendre plus apte à la luxure et aux plaisirs charnels ? L'adultère ne tourne-t-il pas ses pensées vers la convoitise et le pillage des autres afin d'être en mesure d'entretenir ses prostituées et ses maîtresses, et de continuer dans cet amour dégoûtant et illicite? Ne se gonfle-t-il pas d'envie contre les autres, craignant que sa proie ne soit séduite et enlevée [à sa convoitise] ? Encore une fois, n'est-il pas colérique et rempli de colère et de désagrément, même contre sa bien-aimée, si jamais ses demandes bestiales et démoniaques ne sont pas écoutées ? Quel péché, quelle genre de péché n'est pas associé à la fornication et à la prostitution ? C'est un monstre qui a beaucoup de têtes. Il accueille toutes sortes de vices et rejette toutes les sortes de vertus. Si un seul péché apporte la damnation, que penser de ce péché qui s'accompagne de tous les maux, et sert à tout ce qui est détestable à Dieu, qui est damnable et agréable à Satan ?
Grande est la damnation suspendue au-dessus des têtes des fornicateurs et des adultères. Et que dire des autres ennuis qui sortent et s'écoulent de ce cloaque puant de la prostitution ? Ne s'agit-il pas de ce trésor entre tous qui est le plus considéré par les gens honnêtes, la bonne réputation et le nom d'un homme et d'une femme, qui sont salis par la prostitution ? Quel patrimoine, quelle substance, quels biens, quelles richesses la prostitution ne consume-t-elle pas rapidement en les réduisant à rien ? Quelles vaillances et forces ne sont-elles pas affaiblies et détruites par la prostitution ! Quelle beauté, bien qu'elle n'ait jamais été parfaite, n'est pas défigurée par la prostitution ! La prostitution n'est-elle pas une ennemie de la jolie fleur de la jeunesse ? Et n'apporte-t-elle pas des cheveux gris et la vieillesse avant l'âge ? Quel don de la nature, si précieux soit-il, n'est pas corrompu par la prostitution ? La vérole, et d'autres maladies, ne viennent-elles pas avec la prostitution ? D'où viennent les si nombreux bâtards et enfants illégitimes, au grand déplaisir de Dieu et au grand déshonneur des saints liens du mariage, sinon de la prostitution ? Combien sont ceux qui consomment toute leur substance et tous leurs biens, et tombent à la fin dans la plus extrême pauvreté, et qui ensuite se mettent à voler et sont pendus, à cause de la prostitution ! Combien de disputes et d'assassinats viennent de la prostitution ? Combien de jeunes filles sont déflorées, combien de femmes sont corrompues, combien de veuves sont souillées par la prostitution ! Combien le bien et la richesse commune sont appauvris et troublés par la prostitution ! Combien la Parole de Dieu est-elle outragée et dépréciée par la prostitution et par les prostituées !
De ce vice découlent une grande partie des divorces qui sont aujourd'hui devenus une habitude ordinaire, initiée par l'autorité privée des hommes, au grand déplaisir de Dieu et à la violation du plus saint des liens du mariage. Car quand ce très détestable péché s'est infiltré dans la poitrine de l'adultère de telle sorte qu'il se retrouve empêtré avec un amour illicite et peu chaste, sa vraie femme légitime est aussitôt méprisée ; sa présence est honnie ; sa compagnie dérange et est détestable ; tout ce qu'elle fait est objet de mépris ; il n'y a pas de tranquillité dans sa maison aussi longtemps qu'elle est en vue ; bref, mieux vaut qu'elle s'en aille, car son mari ne peut plus la supporter. Ainsi, à cause de la prostitution, la femme honnête et innocente est délaissée et une prostituée est accueillie à sa place; et il en est souvent arrivé de même de la part de la femme à l'égard de son mari. Quelle abomination ! Christ notre Sauveur, Dieu et homme, qui vient pour rétablir la Loi de Son Père céleste dans le bon sens, qui comprend et donne du sens, a parmi d'autres choses réprouvé l'abus de cette Loi de Dieu. Car tandis que les Juifs ont longtemps accepté, par habitude, de renvoyer leur femme à plaisir pour toutes sortes de raisons, Christ corrige cette mauvaise coutume, enseigne que si un homme répudie sa femme et en épouse une autre pour n'importe quelle raison, sauf l'adultère (qui alors entraînait la condamnation à mort), il est adultère ; et il force par là sa femme, ainsi divorcée, à commettre l'adultère si elle s'unit à un autre homme. Dans quel mauvais cas se retrouvent les adultères, qui pour l'amour d'une prostituée, répudient leur vraie femme légitime, ce qui est contre la loi, le droit, la raison et la conscience ? Ils sont damnés ! Une destruction soudaine tombera sur eux s'ils ne se repentent pas ni ne s'amendent. Car Dieu ne supportera pas toujours que le lien sacré du mariage soit ainsi déshonoré, détesté et méprisé. Il punira d'un coup cette manière de vivre charnelle et licencieuse, et fera en sorte que Son saint ordonnancement soit à nouveau révéré et honoré. Car les liens matrimoniaux sont sûrement, comme l'Apôtre l'a dit, « honorables parmi tous les hommes et le lit conjugal respecté, mais les prostituées et les fornicateurs seront jugés par Dieu », c'est à dire punis et condamnés.
Mais quel est le but de ce travail de description et d'exposition du grand péché de prostitution et des ennuis qui en résultent et en découlent, voyant que la poitrine et la langue manqueront bientôt à tout homme avant qu'il ne le souhaite, à cause de l'abomination et de l'horreur de ce péché? Malgré cela, ceci vous est déclaré dans le but que tous les hommes fuient la prostitution et vivent dans la crainte de Dieu. Que Dieu fasse que cela ne soit pas dit en vain !
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{28} 3. Dans la deuxième partie de ce sermon sur l'adultère, que nous avons lu la dernière fois, vous avez appris avec quel sérieux l'Écriture nous avertit d'éviter le péché d'adultère, et d'adopter une vie nette ; et que par l'adultère nous tombons dans toutes sortes de péchés et nous sommes enchaînés au diable comme des esclaves, mais que par une vie nette nous sommes faits membres de Christ, et finalement que l'adultère emmène son homme loin de toute bonté et le conduit tête baissée dans tous les vices, toutes les sottises et toutes les misères. Je vais vous déclarer maintenant et en ordre quels graves punitions Dieu a infligées autrefois aux adultères, et comment certains princes aussi l'ont puni, afin que vous saisissiez que la prostitution et la fornication sont des péchés non moins détestables aux yeux de Dieu et aux gens de bien que d'autres dont j'ai parlé.
Dans le premier livre de Moïse nous lisons que quand l'espèce humaine a commencé à se multiplier sur la terre, les hommes et les femmes se sont si grandement voués aux plaisirs de la chair et aux loisirs dégoûtants qu'ils vivaient sans aucune crainte de Dieu. Dieu, voyant leur manière de vivre bestiale et abominable, et voyant qu'ils ne s'amendaient pas mais aggravaient chaque jour plus que la veille leurs façons impures et pécheresses, S'est repenti d'avoir créé l'homme, et pour montrer combien Il déteste l'adultère, la prostitution, la fornication et toute impureté, Il a fait jaillir toutes les sources des profondeurs de la terre et il a ouvert les écluses du ciel, de telle sorte que la pluie est tombée sur la terre pendant 40 jours et 40 nuits ; et de cette façon Il a détruit le monde entier et toute l'espèce humaine, excepté 8 personnes, c'est à dire Noé, le « prédicateur de la droiture » comme St Pierre l'appelle, sa femme, ses trois fils et leurs épouses. Ô quelle grave calamité Dieu a-t-Il envoyée à toutes les créatures vivantes, à cause du péché de prostitution ! Car Dieu s'est vengé non seulement sur l'homme, mais aussi sur les bêtes, les volailles et toutes les créatures vivantes. L'homicide n'était pas une nouveauté ; cependant le monde n'a pas été détruit pour cela ; mais à cause de la prostitution, le monde entier, à quelques exceptions près, fut recouvert par les eaux et périt ainsi. Ceci est un exemple qui mérite qu'on s'en souvienne, et qui nous vient de Dieu.
Nous lisons encore qu'à cause du dégoûtant péché d'impureté Sodome et Gomorrhe et d'autres villes comme elles ont été détruites par le feu et le soufre du ciel, de telle sorte que nul homme, nulle femme, nul enfant, nul animal, ni tout ce qui pousse sur le sol n'a survécu. Quel cœur ne se mettrait pas à trembler en entendant cette histoire ? Qui est enfoncé si loin dans la prostitution et l'impureté qu'il ne renonce dès à présent et pour toujours à cette manière de vivre abominable, voyant que Dieu punit l'impureté si sérieusement qu'Il fait pleuvoir du ciel le feu et le soufre, pour détruire des villes entières, pour tuer tous les hommes, les femmes, les enfants et toutes les créatures vivantes qui y habitent, pour consumer tout ce qui pousse par le feu ? Qu'est-ce qui peut être un indice plus manifeste de la colère de Dieu et de sa vengeance contre l'impureté de vie ? Notez cette histoire, très chers frères, et craignez la vengeance de Dieu.
Ne lisons-nous pas aussi que « Dieu a frappé Pharaon et sa maisonnée avec de grandes plaies », parce qu'il désirait contre toute piété Sarah, la femme d'Abraham ? Nous lisons la même chose au sujet d'Abimélech, roi de Gérar, bien qu'il ne l'ait pas touchée physiquement.
Ces plaies et punitions divines, Dieu les a fait tomber sur des personnes dégoûtantes et impures avant que la Loi ne soit donnée, quand seule la loi naturelle régnait dans le cœur des hommes, pour leur dire quel grand amour Il avait du mariage, et encore une fois combien Il abhorrait l'adultère, la fornication et toute impureté. Et quand la Loi interdisant l'adultère fut donnée aux Juifs par Moïse, Dieu n'a-t-Il pas commandé que les transgresseurs de cette Loi soient mis à mort ? Les termes de la Loi sont ceux-ci : « Quiconque commet l'adultère avec la femme d'un autre homme mourra de mort certaine, l'homme et la femme avec lui, parce qu'il a brisé le lien conjugal avec la femme de son prochain ». Dans la Loi, il était ordonné qu'une demoiselle et un homme surpris ensemble en train de forniquer devaient être lapidés à mort. Dans un autre passage, nous lisons encore que Dieu a ordonné à Moïse de prendre avec lui tous les chefs et les princes du peuple, et de les pendre au gibet en public, afin que tout homme les voie, parce qu'ils avaient soit commis l'adultère, soit ne l'avaient pas puni. Et Dieu n'a-t-il pas envoyé une telle plaie parmi le peuple à cause de la fornication et de l'impureté, de sorte qu'il en est mort 23.000 en un jour [au désert] ?
Passons, par manque de temps, sur de nombreuses autres histoires de la Sainte Bible qui décrivent les terribles vengeances et le grand déplaisir de Dieu contre les prostituées et les adultères. Certes, cette punition extrême envoyée par Dieu montre à l'évidence combien Il déteste la prostitution. Et ne doutons pas qu'aujourd'hui, Dieu abhorre toute forme d'impureté non moins que dans l'ancienne Loi, et qu'Il la punira sans aucun doute aussi bien dans ce monde que dans le monde à venir. Car Il est un Dieu qui ne tolère aucune méchanceté ; lesquelles doivent être évitées par tous ceux qui tendent à la gloire de Dieu et au Salut de leur âme propre. St Paul a dit « Toutes ces choses ont été écrites pour nous servir d'exemple », et pour nous enseigner la crainte de Dieu et l'obéissance à Sa sainte Loi. Car « si Dieu n'a pas épargné les branches naturelles », Il ne nous épargnera pas non plus, nous qui avons été greffés, si nous commettons de telles offenses. Si Dieu a détruit des milliers et des milliers de gens, de nombreuses villes, et le monde entier à cause de la prostitution, ne nous flattons pas en pensant que nous pourrions échapper et nous en sortir sans punition. Car dans Sa sainte Loi, Il a promis d'envoyer de très graves plaies à ceux qui transgressent Ses saints Commandements.
Ainsi avons-nous entendu jusqu’ici comment Dieu punit le péché d'adultère. Écoutons maintenant certaines lois que les magistrats civils ont établies en divers pays pour le punir, afin que nous sachions combien l'impureté a toujours été détestée dans toutes les cités et les communautés bien ordonnées et parmi tous les gens honnêtes. La loi d'une peuplade Grecque était celle-ci, que toutes les personnes prises en adultère étaient liées et promenées pendant trois jours dans la ville, après quoi, leur vie durant, elles étaient méprisées et comptées comme des personnes honteuses, confuses et privées de toute honnêteté. Et parmi une autre peuplade de la Grèce, les adultères étaient énucléés des deux yeux. Les anciens Romains punissaient la prostitution parfois par le feu, parfois par l'épée. Si un Égyptien était surpris en adultère, loi disait qu'il devait, en présence de tout le peuple, être fouetté nu avec des fouets comportant jusqu'à mille lanières ; et la femme qui était surprise avec lui, on lui coupait le nez, de façon à ce qu'après cela elle soit toujours connue comme prostituée, et donc abhorrée de tous les hommes. Chez les Arabes, ceux qui étaient surpris en adultère étaient décapités. Les Athéniens punissaient la prostitution de mort, de la même façon. Les barbares Tartares aussi. Et même les Turcs, encore aujourd'hui, qui sont pris en adultère, aussi bien l'homme que la femme, sont directement lapidés à mort, sans pitié.
Nous voyons ainsi que des lois pieuses ont été conçues dans le passé par les pouvoirs pour éradiquer la prostitution et pour maintenir le mariage saint et les relations pures. Et les auteurs de ces lois n'étaient pas des Chrétiens mais des païens, qui étaient cependant si enflammés par l'amour de l'honnêteté et de la pureté de vie que pour les défendre, ils ont fait des lois pieuses, ne tolérant pas que ni la fornication ni l'adultère restent impunis dans leurs royaumes.
Christ a dit au peuple : « Les Ninivites se lèveront au Jugement de cette nation », en parlant des Juifs infidèles, « et ils les condamneront, car ils se sont repentis à la prédication de Jonas, mais voyez », dit-Il, « Un plus grand que Jonas est ici », voulant dire : Lui-même ; et malgré cela, ils ne se repentent pas. Ne pensez-vous pas que les tribus grecques, les Arabes, les Athéniens, et tant d'autres, se lèveront au Jugement et nous condamneront, car ils ont cessé l'adultère sur des commandements humains, or nous avons la Loi, des préceptes clairs, et les Commandements de Dieu, et malgré cela abandonnons-nous notre dégoûtante relation ? En vérité, en vérité, le Jugement dernier sera plus clément pour ces païens que pour nous, sauf si nous nous repentons et que nous nous amendons. Car bien que la mort du corps nous semble une grave punition dans ce monde pour la prostitution, cette peine n'est rien en comparaison des graves tourments que les adultères, les fornicateurs et tout les impurs subiront après cette vie. Car ils seront tous exclus et jetés dehors du royaume des cieux, comme St Paul l'a dit : « Ne vous y trompez pas, car ni les prostituées, ni les adorateurs d'images, ni les adultères, ni les mous, ni les sodomites, ni les voleurs, ni les cupides, ni les buveurs, ni les diffamateurs, ni les ravageurs n'hériteront du royaume des cieux ». Et dans l'Apocalypse, St Jean dit que « les adultères auront leur part » avec les meurtriers, les sorciers, les enchanteurs, les menteurs, les idolâtres, et les autres de la même sorte « dans le lac qui brûle avec le feu et le soufre, ce qui est la seconde mort ».
La punition du corps, même mort, a une fin, mais la punition de l'âme que St Jean appelle la seconde mort dure à toujours ; il y aura du feu et du soufre, il y aura des pleurs et des grincements de dents, et le ver qui rongera la conscience des damnés ne mourra jamais. Ô qui sont-ils ceux dont le cœur ne distille même des gouttes de sang, en entendant et en envisageant ces choses ? Si nous tremblons et frissonnons en entendant et en comprenant ce que signifient ces peines, Ô que feront donc ceux qui les ressentiront, ceux qui les subiront, oui, et qui souffriront toujours dans un monde sans fin ? Que Dieu aie pitié de nous ! Celui qui est maintenant à ce point noyé dans le péché, au-delà de toute piété, qui sera attiré plus par un éphémère plaisir dégoûtant et répugnant, que par la perte de la gloire éternelle ? Encore une fois : celui qui est si adonné aux convoitises de la chair et à la luxure qu'il ne craint pas du tout les peines du feu de l'enfer ?
Mais écoutons comment nous pouvons éviter le péché de prostitution et l'adultère afin de marcher dans la crainte de Dieu et être libérés des tourments graves et intolérables qui habitent les gens impurs. Pour éviter la fornication, l'adultère et l'impureté, veillons par-dessus tout à garder notre cœur propre de toute mauvaise pensée et convoitise charnelle ; car dès qu'il en est affecté et corrompu, nous tombons tête baissée dans toutes sortes d'impiétés. Nous le ferons facilement si, lorsque nous sentons au dedans de nous que notre vieil ennemi Satan nous pousse à la prostitution, nous ne consentons en aucune façon à ses suggestions et machinations, et si nous lui résistons vaillamment et si nous nous opposons à lui au moyen d'une foi forte dans la Parole de Dieu, lui objectant toujours dans notre cœur ce Commandement de Dieu ; « Il est écrit, Tu ne commettras pas d'adultère ». Il serait bon pour nous, aussi, de toujours vivre dans la crainte de Dieu et d'avoir à l'esprit les graves menaces de Dieu contre tous les pécheurs impénitents, et de considérer combien ce plaisir est éphémère, bref et dégoûtant, auquel Satan nous pousse continuellement, et combien la punition prévue pour ce péché est intolérable et éternelle. De plus, user de tempérance et de sobriété en mangeant et en buvant, éviter les relations impures et les compagnies impropres, fuir la paresse, faire ses délices de la lecture de la Parole de Dieu, et se livrer en tout temps à des œuvres pieuses, aidera grandement à éviter la prostitution.
Et ici, toutes les classes doivent être invitées, mariés et célibataires, à aimer la chasteté et la pureté de vie. Car les mariés sont tenus par la Loi de Dieu de s'aimer dans la pureté, et qu'aucun des deux n'aille chercher un amour étranger. L'homme ne doit s'unir qu'à sa femme, et la femme seulement à son mari. Ils doivent tant se plaire ensemble qu'aucun d'eux ne convoite une autre personne. Et comme ils sont tenus de vivre ainsi en toute piété et honnêteté, c'est donc leur devoir d'élever vertueusement leurs enfants en s'assurant qu'ils ne tombent pas dans le piège de Satan ni dans aucune impureté, mais qu'ils arrivent purs et honnêtes au saint mariage quand il sera temps. Et de la même façon, les maîtres et les directeurs doivent veiller à ce qu'aucune prostitution, ni aucune impureté ne soit le fait de leurs serviteurs. Et encore ceci : ceux qui sont célibataires et ressentent en eux qu'ils ne peuvent pas vivre sans la compagnie d'une femme, qu'ils aient chacun une femme à soi et qu'ils vivent ensemble pieusement. « Car il est mieux de se marier que de brûler » et pour éviter la fornication, dit l'Apôtre, « Que chaque homme ait sa propre femme et chaque femme son propre mari ». Finalement, tous ceux qui ressentent en eux-mêmes la capacité suffisante, par l'opération du Saint-Esprit, de mener une vie solitaire dans la continence, qu'ils louent Dieu pour ce don et recherchent tous les moyens possibles pour s'y maintenir, par des prières continuelles et d'autres exercices vertueux de la sorte.
Si nous voulons tous nous consacrer à éviter de cette manière la fornication, l'adultère et l'impureté, en menant nos vies en toute piété et honnêteté, servant Dieu avec un cœur pur et propre, et le glorifiant dans nos corps en menant une vie innocente, nous pouvons être assurés d'être du nombre de ceux dont Christ notre Sauveur a parlé dans l'Évangile de cette manière : « Bénis sont ceux qui sont purs de cœur, car ils verront Dieu ». À qui seul soient toute gloire, tout honneur, la direction et la puissance, éternellement. Amen.