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SERMON pour le 18ème dimanche après la Trinité

1 Corinthiens 1/4-8 ; Matthieu 22/34-46

 

ATTENDRE JÉSUS

 

Les débats électoraux télévisés sont souvent l'occasion de troubler l'adversaire en lui posant des questions-pièges. Il s'agit de le faire tomber ou trébucher, afin de le discréditer aux yeux du public. Et gare à ceux qui auront un trou de mémoire ou qui, déstabilisés, répondront à côté de la question : il est si facile de biaiser pour échapper au ridicule en changeant de sujet ! Tel n'est pas le cas de Notre Seigneur Jésus-Christ. Il répond pertinemment à toutes les demandes, car Il est Dieu, et de ce fait Il connaît tout, Il sait tout ; et Il pardonne tout à ceux qui se repentent de tout le mal qu'ils ont accompli ou simplement médité.

 

Mais les Pharisiens sont des hommes fiers et orgueilleux ; ils tiennent à leur autorité sur le peuple et n'acceptent pas de voir le peuple se détourner d'eux pour s'attacher à Jésus-Christ. Surtout, ils font tout leur possible légalement pour piéger Jésus et Le prendre en défaut. Les Pharisiens ne comprennent pas que c'est peine perdue, car Christ connaît la Loi de Moïse bien mieux qu'eux : Il est l'auteur de la Loi, Il est la Loi incarnée dans un corps d'homme, et Il l'applique sans jamais pécher, sans jamais manquer le but de la Loi qui est d'aimer Dieu et le proche prochain - les Anglophones disent "nos voisins".

 

La stratégie des Pharisiens est la suivante : ils veulent pousser Jésus au blasphème. S'Il dit qu'Il est Dieu - et c'est la vérité - Il est cuit ; Son sort est scellé et il mérite la peine capitale aux yeux de ceux qui ne Le croient pas ou feignent de ne pas Le croire. Ils multiplient les contrôles d'identité à Son égard. Mais Jésus ne répond pas directement à cette question de savoir qui Il est, tant que Son heure de mourir crucifié n'est pas venue. Non seulement Christ a encore des vérités célestes à enseigner à Ses disciples (Jean 21/24-25) : « C’est ce disciple qui rend témoignage de ces choses et qui les a écrites, et nous savons que son témoignage est vrai. Jésus a fait encore beaucoup d’autres choses. Si on les écrivait en détail, je ne pense pas que le monde entier pourrait contenir les livres qu’on écrirait », mais encore Christ entend mourir au jour et à l'heure où l'agneau de la pâque juive est sacrifié dans le Temple de Jérusalem. Il ne laisse rien au hasard car Il dirige tout, toutes et tous, selon Sa volonté qui est aussi la volonté du Père céleste (Jean 6/38) : « En effet, je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais celle de celui qui m’a envoyé ».

 

Le légalisme, c'est la Loi sans l'Amour. Or, Christ enseigne non seulement l'amour de la Loi, mais la Loi appliquée avec cet Amour de Dieu et des voisins qui est la manifestation de la grâce divine. Mais les Pharisiens sont trop orgueilleux pour s'en souvenir. Leur orgueil de classe les conduit au mépris des petites gens - en fait de tout le peuple, puisqu'ils se croient supérieurs au monde entier. Ils prennent au pied de la lettre et s'attribuent ces versets visant en réalité le Messie promis et non pas eux-mêmes (Psaume 110/1-2) : « L’Eternel a déclaré à mon Seigneur : "Assieds-toi à ma droite jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis ton marchepied." L’Eternel étendra de Sion le sceptre de ta puissance : domine au milieu de tes ennemis ! ». Jésus-Christ en est parfaitement conscient, mais Il prend le contrepied de la tyrannie, sans pour autant être démocrate puisqu'Il est Roi (Marc 10/42-45) : « Jésus les appela et leur dit : "Vous savez que ceux que l’on considère comme les chefs des nations dominent sur elles et que leurs grands les tiennent sous leur pouvoir. Ce n’est pas le cas au milieu de vous, mais si quelqu’un veut être grand parmi vous, il sera votre serviteur ; et si quelqu’un veut être le premier parmi vous, qu’il soit l’esclave de tous. En effet, le Fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup." ». Et Paul précise en Romains 14/17 : « En effet, le royaume de Dieu, ce n’est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie, par le Saint-Esprit ». Plus concrètement, le même Paul nous invite à pratiquer les vertus chrétiennes (Colossiens 3/12-14) : « Ainsi donc, en tant qu’êtres choisis par Dieu, saints et bien-aimés, revêtez-vous de sentiments de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience. Supportez-vous les uns les autres et, si l’un de vous a une raison de se plaindre d’un autre, pardonnez-vous réciproquement. Tout comme Christ vous a pardonné, pardonnez-vous aussi. Mais par-dessus tout cela, revêtez-vous de l’amour, qui est le lien de la perfection ».

 

Christ répond aux Pharisiens dominateurs dont le cœur est dur comme la pierre et les enjoint d'aimer : Aimez Dieu et votre prochain, tels sont les deux commandements de Dieu qui résument tous les autres. Quand nous aimons Dieu nous respectons Notre Père, Son Nom, Son jour de repos, nos parents ; nous ne tuons pas ; nous ne trompons pas notre conjoint ; nous ne volons pas ce qui appartient à notre prochain ; nous ne portons pas de faux témoignage contre lui ; et nous n'envions rien de ce qu'il possède. Tous les commandements de Moïse découlent de ce principe régulateur du Royaume des Cieux : Aimons Dieu, nos semblables, et dominons toute Sa Création sans en abuser, en la respectant.

 

Mais les Pharisiens ne l'entendent pas ainsi. C'est pourquoi ils s'emploient à faire taire le Seigneur et leur Dieu en visite parmi eux. Ils ont remplacé la Parole de Dieu par leur tradition humaine ; et ils pensent se soumettre le peuple de cette manière, sans amour ni respect pour autrui. Leur ressemblance avec nos dirigeants actuels n'a rien de fortuit. Hélas ! Or, on ne peut pas faire taire la Parole de Dieu (Luc 19/39-40) : « Du milieu de la foule, quelques pharisiens dirent à Jésus : "Maître, reprends tes disciples." Il répondit : "Je vous le dis, si eux se taisent, les pierres crieront ! ».

 

Jésus reprend la parole et questionne les Pharisiens à Son tour (Matthieu 22/41-42) : « Comme les pharisiens se trouvaient rassemblés, Jésus les interrogea en ces termes : "Que pensez-vous du Messie ? De qui est-il le fils ?" Ils lui répondirent : "De David." ». Ici, il faut se souvenir que le même mot hébraïque signifie "fils" et "serviteur" : dans l'Antiquité, un fils est au même rang que les serviteurs ; il est au service de son père, comme Jésus-Christ est au service de Son Père. On peut donc traduire ces deux versets autrement : « Comme les pharisiens se trouvaient rassemblés, Jésus les interrogea en ces termes : "Que pensez-vous du Messie ? De qui est-il le serviteur ?" Ils lui répondirent : "De David." ». Or, on ne peut pas tout à la fois être le serviteur et le seigneur de son père : « Si donc David l’appelle Seigneur, comment peut-il être son fils ? » (Matthieu 22/45). Jésus insiste sur le jeu de mots et l'exploite à Son avantage : les Pharisiens sont échec et mat. Jésus leur a définitivement cloué le bec (Matthieu 22/46) : « Aucun ne put lui répondre un mot. Et, depuis ce jour, personne n’osa plus lui poser de questions. ». Tel est le sort de ceux qui prétendent en remontrer à Christ et savoir mieux que Lui ce qu'il en est de la Loi, de la vérité, et de Dieu. Ne cherchez pas ailleurs la cause des divisions entre les églises chrétiennes ! Il y a celles qui respectent, enseignent et mettent en pratique la Parole de Dieu, toute la Parole de Dieu, rien que la Parole de Dieu ; et il y a les autres dont la spécificité est de bâtir leur tradition à partir de considérations humaines. Et toutes ces traditions humaines sont inspirées par l'orgueil. Je n'ai pas besoin de vous faire un dessein… Ces nouveaux Pharisiens osent imposer leurs conditions et leurs limites à Dieu le Père, Fils et Esprit-Saint. Il s'agit ni plus ni moins d'un renversement des valeurs, au prix d'une perversion de la Parole de Dieu. Naturellement, ils cherchent le blasphème chez les autres - ce n'est pas nouveau puisque Jésus-Christ a été affronté de la même manière - sans voir que le blasphème est de leur côté, car ils se placent carrément au-dessus de Dieu, de Celui qui les a créés. On voit même surgir des Bibles amendées, modifiées, expurgées, annotées en contradiction avec ce que dit le texte inspiré. Il est clair qu'elles procèdent de l'inspiration de l'Adversaire de Dieu : Satan lui-même.

On aboutit ainsi à une situation dramatique : ces nouveaux Pharisiens deviennent dogmatiques et s'éloignent de la Parole de Dieu. Ils évitent d'interroger la Bible « … personne n’osa plus lui poser de questions » (Matthieu 22/46c). Ils se replient alors sur leurs dogmes, et certains vont même jusqu'à critiquer et contredire la Parole de Dieu. Les athées n'en font-ils pas autant ? Notez que Christ ne condamne pas les Pharisiens ; Il se contente de les faire taire quand ils disent des bêtises. Et Il attend qu'ils reviennent à Lui comme Nicodème (Jean 3/1-2) : « Or, il y avait parmi les pharisiens un homme du nom de Nicodème, un chef des Juifs. Il vint de nuit trouver Jésus et lui dit : "Maître, nous savons que tu es un enseignant envoyé par Dieu, car personne ne peut faire ces signes miraculeux que tu fais si Dieu n’est pas avec lui." ». Les Pharisiens savent donc que Christ est un enseignant envoyé par Dieu, mais ils le chahutent comme des gamins plutôt que de L'écouter. Leur foi n'est pas adulte. Ils apprennent des formules par cœur et les appliquent sans les comprendre, comme le font les collégiens dans leurs exercices de mathématiques.

Les Réformateurs à l'origine de nos églises biblicistes ont eu le courage de l'humilité, en se conformant strictement à la Parole de Dieu, sans rien en retrancher ni y ajouter. Telle est notre ambition de disciples, non des Réformateurs, mais de Christ, à leur exemple. Nous pouvons dès lors prendre à notre compte le compliment que Paul adresse aux Corinthiens (1 Corinthiens 1/4-6) : « Je dis constamment à mon Dieu toute ma reconnaissance à votre sujet pour la grâce de Dieu qui vous a été accordée en Jésus-Christ. En effet, en lui vous avez été comblés de toutes les richesses, en particulier en ce qui concerne la parole et la connaissance, dans la mesure où le témoignage de Christ a été solidement établi parmi vous ». Et ce témoignage, c'est l'Évangile de Christ - pas les dogmes des hommes qui se croient religieux !

 

Il nous incombe alors de persévérer dans la connaissance de la Parole de Dieu et dans l'obéissance à notre Seigneur Jésus-Christ, nous qui attendons « le moment où notre Seigneur Jésus-Christ apparaîtra » (1 Corinthiens 1/7b). Oui, nous avons cette espérance de voir le Seigneur apparaître lors de Son retour, comme Il l'a promis à Ses fidèles (1 Thessaloniciens 4/16-17) : « En effet, le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d’un archange et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel et ceux qui sont morts en Christ ressusciteront d’abord. Ensuite, nous qui serons encore en vie, nous serons tous ensemble enlevés avec eux sur des nuées à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur ». Ce n'est donc jamais le moment de faiblir dans l'Espérance de la vie éternelle avec Christ.

 

Mais attendre en se tournant les pouces ne suffit pas. Paul conclut ainsi ce passage de son Épître aux Corinthiens (1 Corinthiens 1/7c-8) : « … notre Seigneur Jésus-Christ apparaîtra. C’est lui aussi qui vous affermira jusqu’à la fin pour que vous soyez irréprochables le jour de notre Seigneur Jésus-Christ ». Ne soyons pas crispés en comptant sur nos propres forces humaines, mais faisons confiance au Seigneur qui nous qualifie par Sa grâce (1 Corinthiens 1/7a) : « Ainsi, il ne vous manque aucun don… ». La foi est en effet une confiance en Dieu qui nous instruit par Sa parole et nous purifie par les tentations et épreuves qu'Il permet afin de fortifier notre foi en nous apprenant à ne compter que sur notre seul Seigneur et Sauveur : Jésus-Christ « … et Jésus-Christ crucifié » (1 Corinthiens 2/2). Nous connaîtrons ensuite la gloire des élus, dans le Royaume des Cieux (1 Corinthiens 2/7) : « nous annonçons la sagesse de Dieu mystérieuse et cachée, celle que Dieu, avant tous les temps, avait préparée d’avance pour notre gloire ». Cette gloire qui nous est promise ne vaut-elle pas tout l'or du monde ? Ne vaut-elle pas la peine que nous nous donnons de sonder les saintes Écritures et de les mettre en pratique, chaque jour de notre vie, comme les Chrétiens de Bérée ? (Actes 17/11) : « Ces derniers avaient des sentiments plus nobles que ceux de Thessalonique. Ils accueillirent la parole avec beaucoup d’empressement, et ils examinaient chaque jour les Écritures pour voir si ce qu’on leur disait était exact ».

 

Et qui d'autre pensez-vous que les Réformateurs aient pris comme modèles ? En nous identifiant aux Chrétiens biblicistes de Bérée, nous devenons comme eux… nous ressemblons à des personnages bibliques ! N'ayons pas peur de nous approprier la Bible, de la lire, de la méditer, de la digérer et d'en vivre, car elle est la Parole de la Vie éternelle. N'ayons pas peur des nouveaux Pharisiens qui nous prennent de haut en voulant nous imposer leurs traditions humaines ou nous faire taire. Luc nous a prévenus ! (Actes 17/13) : « Mais quand les Juifs de Thessalonique apprirent que Paul annonçait la parole de Dieu aussi à Bérée, ils y vinrent pour agiter la foule ». Toujours et partout, les évangélistes ont rencontré de l'opposition, comme Paul (2 Corinthiens 11/22-23) : « Sont-ils hébreux ? Moi aussi. Sont-ils israélites ? Moi aussi. Ils sont de la descendance d’Abraham ? Moi aussi. Ils sont serviteurs de Christ ?  — Je parle comme un fou.  — Je le suis plus encore : j’ai bien plus connu les travaux pénibles, infiniment plus les coups, bien plus encore les emprisonnements, et j’ai souvent été en danger de mort ». Mais Dieu nous donne le don de la résilience pour résister aux épreuves et aux contestataires (2 Corinthiens 12/9) : « Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse ». Et c'est dans la totale faiblesse de la mort que nous recevrons la puissance de la résurrection. Amen.

 

Tr. Révd Yves Méra, évêque AOC.

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