
SERMON pour la Sexagésime
2 Corinthiens 11/19-31 ; Luc 8/4-15
LA VANTARDISE
Paul écrit pour la deuxième fois à l'Église de Corinthe… Une fois n'a pas suffi ! Cette église "primitive" est de tendance pentecôtiste, mais de manière excessive. Les Chrétiens de Corinthe sont attirés par le sensationnel, le spectaculaire. Ils se sentent supérieurs parce qu'ils possèdent des richesses supérieures, grâce au commerce. En effet, Corinthe est située sur un lieu de passage obligé pour les bateaux de commerce qui préfèrent traverser le détroit par voie de terre plutôt que de faire le détour du Péloponnèse. Et c'est une étape pour ceux qui - trop lourds - le contournent. Ce sentiment de supériorité les entraîne à la vantardise.
La vantardise est un esprit de jugement, qui ne se contente pas de s'auto-glorifier. Elle s'emploie surtout à rabaisser les autres. En l'espèce, les Corinthiens se sont mis à rabaisser Paul. Ils ont trouvé mieux que lui. Pourtant, Paul est celui qui leur a prêché l'Évangile du Salut, lui, le premier. Mais ils se sont donnés d'autres prédicateurs, selon leur convenance et leur tendance. Ils aiment les flatteries et qu'on leur dise ce qu'ils désirent entendre. Aujourd'hui, les télévangélistes américains ne procèdent pas autrement. Ils flattent leur public et leur présentent le faux évangile de la prospérité et de la permissivité : La Loi de Moïse serait périmée. Il n'y aurait plus de contraintes, plus d'exigence. Ces Chrétiens en viennent à imiter les cultes païens, au nom de Jésus-Christ.
Mais quel est leur but ? Il s'agit de remplir la caisse de la paroisse, et accessoirement les poches du pasteur, en faisant venir beaucoup de monde. Accessoirement, ce grand monde est encore une occasion de se vanter. On se vante de la réussite de l'Église, mais en oubliant de préciser que cette même Église a quelque peu dévié de sa mission en changeant de but. Le but n'est plus le Salut des âmes damnées, mais la statistique numérique. On sait comment remplir facilement une église : Avec des jeux de lumière, de la musique pop ou rock, des danseuses à moitié vêtues, des fauteuils confortables, comme au cinéma ou à la télévision, un bar, un salon de coiffure, une supérette, un service médical incorporés au bâtiment d'église, on attire les mouches, mais qu'en est-il des conversions véritables ? Ces Églises se présentent comme des clubs mondains où il suffit de "passer par les eaux du baptême" pour bénéficier gratuitement des avantages et services annexes proposés. Fort bien. C'est une version matérialiste de la grâce et de la charité. Mais Christ n'y trouverait pas Ses disciples, ni même Paul.
Voilà pourquoi Paul écrit aux Corinthiens en rappelant tout ce qu'il a souffert dans son travail d'évangélisation. Paul ne se vante pas de ses succès. Il ne rabaisse personne. Il déplore seulement que les Corinthiens à qui il a prêché le véritable Évangile de Christ mort et ressuscité pour le pardon de nos péchés s'en détournent et que son enseignement soit annulé par une contre-prédication à prétention super-spirituelle, et en réalité mondaine. Les mérites de Paul ne résident pas dans ses succès, mais dans sa fidélité à la Parole et Dieu et sa persévérance, en dépit de toutes les oppositions et épreuves qu'il a dû subir. Ces épreuves sont provoquées par Satan en colère contre ceux qui prêchent la vérité et arrachent des âmes à l'enfer, son royaume spirituel démoniaque et éternel.
En Angleterre, quand les Anglo-saxons païens ont envahi la moitié de la Grande-Bretagne, ils ont détruit l'Église de Christ. Tertullien, en l'an 208, écrit qu'il y avait des communautés chrétiennes en Angleterre depuis le début des années 60, au premier siècle, dans les parties non romanisées, restées celtiques. Mais après le passage des Vikings venus du Danemark et du Nord de l'Allemagne, il n'en restait presque plus rien. Les premiers missionnaires chrétiens envoyés en Angleterre par le pape Grégoire-le-Grand autour de l'an 600 ont été surpris d'y trouver des communautés chrétiennes survivantes, plus ou moins clandestines mais fidèles à l'Évangile de Christ, en dépit des risques et des persécutions qu'elles subissaient. De grands saints canonisés comme Augustin de Rome, Bède le Vénérable, Cuthbert, Alcuin ont alors restructuré l'Église d'Angleterre avec l'appui de Rome, tout en respectant certaines particularités locales, et on peut les louer pour cela. Mais les vrais héros de cette histoire sont des inconnus : ce sont les moines et prêtres anonymes qui ont maintenu la foi vivante dans un milieu hostile, au péril de leur vie, comme Paul, et cela, durant 5 siècles, totalement isolés du reste du monde chrétien, et en particulier de Rome. Cet isolement ne les a pas empêchés d'évangéliser la Norvège, le Danemark, l'Allemagne, la Bretagne et la Suisse, de leur propre initiative, en dehors de toute directive romaine. Qui dira que l'Esprit n'était pas à l'œuvre parmi eux ?
Paul, en faisant la liste des inconvénients et périls subis par lui au cours de ses voyages missionnaires, apprend aux Corinthiens - et à nous aussi - que les dons de l'Esprit sont confirmés par l'opposition des démons, et qu'il est inconvenant et dangereux de provoquer ces mêmes démons en se vantant des dons spirituels reçus. Voilà pourquoi Paul se glorifie dans sa faiblesse, ce qui est exactement le contraire de la vantardise. En gros, Paul dit qu'il fait ce qu'il peut, mais qu'il peut peu, et que toute la gloire de ses succès revient à Dieu, et non pas à lui. Ni son instruction - pourtant bien réelle - ni ses propres forces humaines - il est handicapé (2 Corinthiens 12/7) : « il m'a été mis une écharde en la chair, un ange de Satan pour me souffleter, afin que je ne m'élevasse point » - ni ses larges dons spirituels - il les a tous reçus - ne sont un motif de se faire valoir. Mais uniquement la grâce de Dieu qui lui a déclaré : « Ma grâce te suffit » - (2 Corinthiens 12/9) : « Mais [le Seigneur] m'a dit : Ma grâce te suffit : car ma vertu manifeste sa force dans l'infirmité. Je me glorifierai donc très volontiers plutôt dans mes infirmités ; afin que la vertu de Christ habite en moi ».
L'Évangile du jour nous propose la fameuse parabole du Semeur qui sort de chez lui et sème la Parole de Dieu dans des cœurs variés. Le Semeur, c'est Dieu qui sort de son royaume céleste et S'incarne en Jésus-Christ pour enseigner la Vérité de Dieu aux foules. (Luc 8/1) : « Il allait de ville en ville, et de bourgade en bourgade, prêchant et annonçant le royaume de Dieu ». Christ prêchait à des milliers sur des collines ou au bord de la mer de Galilée, pour qui Il a multiplié les pains et les poissons, et enfin au Temple de Jérusalem, juste avant Sa Passion.
Tous les cœurs n'accueillent pas Son enseignement de la même façon :
1. (Luc 8/12) : « Ceux qui ont reçu la semence le long du chemin, ce sont ceux qui écoutent la parole ; mais ensuite vient le démon, qui ôte de leur cœur la parole, de peur qu'en croyant ils ne soient sauvés ». Vous pouvez me croire : le premier auditeur de toute prédication - et il est parmi nous aujourd'hui - c'est le diable ! Satan ferme les oreilles et le cœur de ceux qui écoutent la prédication, et dont les noms ne sont pas inscrits dans le Livre de Vie. (Apocalypse 20/15) : « Et quiconque ne fut pas trouvé écrit au Livre de vie, fut jeté dans l'étang de feu ». Telle sera la part du feu, au jour du Jugement.
2. (Luc 8/13) : « Et ceux qui ont reçu la semence dans un lieu pierreux, ce sont ceux qui ayant ouï la parole, la reçoivent avec joie ; mais ils n'ont point de racine ; ils croient pour un temps, mais au temps de la tentation ils se retirent ». Remercions Dieu d'avoir assisté Paul de Sa toute-puissance, au milieu des tentations et des épreuves - c'est la même chose - qui ne lui ont pas manqué. Mais Dieu n'assiste pas tous les auditeurs de la prédication, car tous ne sont pas prédestinés au Salut.
3. (Luc 8/14) : « Et ce qui est tombé entre des épines, ce sont ceux qui ayant ouï la parole, et s'en étant allés, sont étouffés par les soucis, par les richesses, et par les voluptés de cette vie, et ils ne rapportent point de fruit à maturité ». Telles sont les Églises riches. Les affaires - le business - les soucis d'argent, et l'esprit mondain les stérilisent. Elles attirent beaucoup de gens, comme le miroir aux alouettes, mais c'est pour les maintenir sous la domination des démons. Ces gens sont des chrétiens culturels, mais le cœur leur manque pour s'engager et prendre leur bâton de pèlerin évangéliste. « Nul, après avoir allumé la lampe, ne la couvre d'un vaisseau, ni ne la met sous un lit » (Luc 8/16a). Ce sont des consommateurs de services et très accessoirement de prédication vantarde. Ils aiment les beaux discours ronflants… et ils ronflent.
4. (Luc 8/15) : « Mais ce qui est tombé dans une bonne terre, ce sont ceux qui ayant ouï la parole, la retiennent dans un cœur honnête et bon, et rapportent du fruit avec patience ». Notez bien que ce n'est pas par une décision personnelle de suivre Christ que les élus sont Sauvés et produisent du fruit. La bonne terre, ce sont des cœurs choisis par Dieu et préparés par Sa grâce à recevoir Sa Parole et à la mettre en pratique. (Matthieu 12/50) : « Car quiconque fera la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère ». Ils mettent la lampe de Christ « sur un chandelier, afin que ceux, qui entrent voient la lumière » (Luc 8/16b).
Il y a donc 4 sortes d'auditeurs de la Parole de Dieu - et je ne parle pas des plus nombreux : ceux qui refusent même de l'entendre. Tous seront-ils sauvés ? Pas du tout ! Le dernier quart seulement sera sauvé : les prédestinés dont le nom est inscrit au Livre de Vie ! Pour la majorité, c'est l'enfer qu'ils préfèrent. Et ils font tout ce qu'ils peuvent pour mériter ce sort funeste comme le rappelle l'apôtre Jean dans le quatrième Évangile (Jean 3/19) : « Or c'est ici le sujet de la condamnation, que la lumière est venue au monde, et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises ». Les soi-disant "bonnes œuvres" dont ils se vantent tant sont mauvaises ; elles sont pourries. Luther en dit ceci : "Ce sont des péchés magnifiques", parce que ces œuvres ne sont pas faites en Dieu ni à Sa seule gloire.
Il y a donc 4 âges de la vie - enfance, adolescence, maturité, vieillesse - 4 Évangiles et 4 sortes d'auditeurs de la Parole. Le premier Évangile - celui de Matthieu - insiste sur la Loi et le jugement. Le second Évangile - celui de Marc - met l'accent sur les guérisons opérées par Jésus. Le troisième Évangile - celui de Luc - met en avant la charité, avec les paraboles du bon Samaritain et du fils prodigue. Et le quatrième Évangile - celui de Jean - est celui de l'Amour de Dieu qui vient sauver Ses élus en les arrachant aux griffes de Satan par Sa mort douloureuse et Sa résurrection glorieuse (Jean 3/16) : « Car Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle ».
C'est par amour pour Ses élus que Christ est venu parmi nous, proférant une Parole « pleine de grâce et de vérité » (Jean 1/14). Satan a cru le faire taire en lui infligeant la mort sur la croix. Mais la Vérité ne peut être retenue captive par le Menteur. Dès le troisième jour, la Vérité éclatait au grand jour, elle sortait de la tombe où on avait cru l'enfermer, et Satan est vaincu, son mensonge est éventé.
(Jean 1/16-17) : « Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce. Car la Loi a été donnée par Moïse ; la grâce et la vérité est venue par Jésus-Christ ». (Jean 1/12-13) : « à tous ceux qui l'ont reçu, il leur a donné le droit d'être faits enfants de Dieu, à ceux qui croient en son Nom ; lesquels ne sont point nés de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme ; mais ils sont nés de Dieu ». Amen.